En Chine, où parler de sexualité reste un sujet délicat et où la publicité pharmaceutique est strictement encadrée, la marque Viagra a trouvé un moyen aussi créatif que touchant de se faire entendre — sans jamais enfreindre les règles.
La campagne baptisée Make Love Last, imaginée par Ogilvy Shanghai, s’éloigne volontairement des codes publicitaires classiques. Pas de slogans évocateurs, pas de promesses médicales explicites. À la place, un projet artistique centré sur des couples réels et leurs récits d’intimité, dans une approche profondément humaine.
Trois histoires, une même pudeur
Au cœur de la campagne, trois couples témoignent, face caméra, de leur quotidien, de l’érosion du désir avec les années, des silences accumulés, de la tendresse parfois perdue. Ces moments de vérité, filmés avec sobriété, dessinent les contours d’une intimité authentique, loin des représentations idéalisées.
Puis vient l’expérience : les couples se retrouvent seuls dans une pièce, sans directives, simplement observés par une caméra en time-lapse. Ce dispositif discret capture leurs gestes, leurs regards, leurs hésitations… Loin d’être une mise en scène, ces instants deviennent les témoins silencieux d’un lien qui se réinvente, avec en toile de fond l’effet discret mais symbolique du médicament, jamais montré ni nommé.
L’art pour contourner les interdits
Dans un pays où les messages à caractère sexuel sont rigoureusement contrôlés, l’art devient un refuge expressif. En présentant les clichés issus des séances dans une galerie privée, Ogilvy transforme l’intimité en œuvre d’art. La démarche évite ainsi toute infraction aux règles strictes de la communication pharmaceutique, tout en suscitant une émotion sincère chez les participants comme chez les spectateurs.
À l’occasion du Qixi Festival, équivalent chinois de la Saint-Valentin, les images et témoignages ont été diffusés sur les réseaux sociaux. Le succès a été immédiat : sans jamais prononcer les mots tabous, la campagne a déclenché un dialogue massif sur l’amour, le désir et la reconnexion dans le couple.
Une leçon de communication sensible
Make Love Last ne cherche pas à vendre un produit, mais à remettre en lumière une réalité intime : l’usure du désir au fil du temps, et l’importance de préserver le lien. Dans cette optique, Viagra n’est plus une simple pilule, mais un facilitateur de dialogue, un levier pour raviver la flamme.
En contournant la censure par l’émotion et la subtilité, Ogilvy Shanghai démontre qu’il est possible de faire de la publicité sensible, intelligente et respectueuse des contextes culturels. Cette approche stratégique pourrait bien servir de modèle à d’autres marques évoluant dans des environnements réglementés ou tabous.
