Dans un paysage médiatique en constante évolution, la communication 360° s’impose comme une nécessité pour les marques souhaitant maximiser leur impact. Marcom Edge, sous la direction de Dr. Aboubakr Jeddioui, Directeur Général Associé, a su faire de cette approche un véritable modèle stratégique, alliant ATL et BTL sans distinction hiérarchique.
Avec une décennie d’existence et une équipe de 50 collaborateurs, l’agence s’est construite autour d’une vision holistique de la communication, inspirée des standards internationaux. Cette philosophie lui a permis de se démarquer sur la scène nationale et africaine, remportant de nombreuses distinctions, dont le prix de l’Agence de l’Année aux Impériales 2024.
Dans cet entretien, Dr. Aboubakr Jeddioui partage sa vision du 360°, les clés d’une campagne réussie, ainsi que les défis et perspectives du secteur de la communication au Maroc.
Marcom Edge se positionne comme une agence de communication 360°. Comment cette approche se traduit-elle concrètement dans vos campagnes et votre manière de concevoir la communication aujourd’hui ?Pour nous, le 360° n’est pas un mot à la mode, c’est un vrai modèle de pensée. Chez Marcom Edge, cela englobe à la fois l’ATL et le BTL, sans hiérarchie entre les deux. Mon associé et moi venons tous les deux de Procter & Gamble, et on a été très influencés par le modèle holistique de communication qu’on y pratique : une approche qui vise à créer une vraie synergie entre les différents leviers, qu’ils soient média ou hors média, pour former un tout cohérent et puissant.
C’est sur cette vision que nous avons construit notre agence, il y a maintenant 10 ans. Aujourd’hui, nous sommes 50 collaborateurs, et nous avons structuré toute notre organisation autour de cette logique. Très concrètement, cela se traduit par des big ideas conçues dès le départ pour vivre sur tous les canaux, TV, digital, affichage, street, in-store, tout en restant claires, cohérentes et percutantes.
Notre organisation est pensée en pôles d’expertise : un pôle ATL, un pôle BTL. Mais ce qui fait la différence, à mon sens, c’est la capacité à faire dialoguer ces expertises, à les aligner autour d’une même vision stratégique. Et c’est sans doute ce qui explique que notre positionnement 360° se reflète aussi dans les résultats : ces deux dernières années, nous avons remporté 25 prix couvrant l’ensemble des disciplines : Best TV Spot et Best Integrated Experience Campaign aux Impériales, Best Digital Marketing Campaign et Best Social Media Campaign au African Digital Summit, ou encore Best Event aux Impériales 2025… jusqu’au prix de l’Agence de l’Année aux impériales 2024.
Quels sont, selon vous, les éléments essentiels d’une campagne 360° réussie ?À mon sens, une campagne 360° réussie commence toujours par une big idea forte. Une idée simple, claire, émotionnelle, mais surtout suffisamment flexible pour vivre et s’exprimer sur tous les points de contact, sans jamais se dénaturer. C’est cette idée centrale qui aligne tout le reste : la création, les canaux, les formats, le timing.
Ensuite, tout est question d’orchestration. Une campagne 360°, ce n’est pas une juxtaposition d’actions sur différents supports, c’est une narration fluide, pensée comme un tout. Le mass media donne la portée, le digital entretient la conversation, le terrain crée l’ancrage réel, l’in-store transforme l’intérêt en action. C’est une mécanique de précision où chaque canal doit jouer son rôle, ni plus, ni moins.
Je pense aussi qu’on ne peut plus parler de 360° aujourd’hui sans intégrer la dimension social media first. D’ailleurs, si je prends un peu de recul sur nos dernières campagnes les plus réussies au Maroc mais aussi dans d’autres marchés, ce sont souvent celles qui ont été pensées d’abord pour le digital, voire directement pour les réseaux sociaux. Cela ne veut pas dire qu’elles n’existent pas ailleurs, au contraire. Mais leur point de départ est souvent une idée pensée pour engager, partager, faire réagir. Et ensuite, cette idée se décline sur les autres points de contact, avec cohérence.
Quels sont les défis majeurs lors de la mise en place d’une campagne multicanale ?L’un des premiers défis d’une campagne multicanale, c’est le timing. Ce qu’on imagine simple en théorie devient vite un casse-tête en pratique : faire cohabiter des délais de production TV, des timings d’impression, des plannings éditoriaux en temps réel et des activations terrain, le tout en respectant une logique stratégique claire, c’est un véritable jeu d’orfèvre !
Ensuite, il y a le défi de la cohérence des messages. Une campagne multicanale ne fonctionne que si chaque prise de parole est alignée avec l’intention initiale, même quand le ton, le format ou la cible varient. L’idée n’est pas de répéter le même message partout, mais de le faire évoluer intelligemment, en restant fidèle à l’ADN de la campagne. Et ça demande beaucoup de rigueur créative.
Je dirais aussi que l’un des enjeux majeurs, souvent sous-estimé, c’est l’adaptation aux usages spécifiques de chaque canal. Ce qui fonctionne en télé ne fonctionne pas en social. Ce qui attire l’œil sur un billboard n’engage pas forcément en story. Il faut donc repenser le storytelling à chaque point de contact, sans jamais perdre le fil rouge. Et ça, ça demande non seulement de la créativité, mais aussi une vraie connaissance des comportements médias.
Enfin, il y a la pression opérationnelle : coordonner les équipes, les prestataires, les validations client, les tests, les imprévus. Derrière une campagne fluide, il y a toujours une organisation ultra-millimétrée. Une bonne idée, si elle est mal déployée, perd tout son potentiel.
Comment voyez-vous évoluer le secteur de la communication au Maroc dans les années à venir ?Je pense que le secteur de la communication au Maroc est à un tournant passionnant. On sent une vraie montée en puissance. Les marques deviennent plus ambitieuses, les consommateurs plus exigeants, et les agences, de plus en plus outillées pour proposer des campagnes de niveau international.
À mon sens, l’une des évolutions majeures sera l’ancrage encore plus fort du digital, mais dans une logique de contenu intelligent, pas juste de présence. On ne parle plus seulement de publier, mais de capter l’attention, de créer de l’utilité, de provoquer des conversations. Les marques qui réussiront seront celles qui sauront raconter des histoires vraies, utiles et adaptées aux spécificités des plateformes, tout en gardant une cohérence globale.
Je vois aussi une évolution du côté de l’expérience physique, qui va retrouver une place centrale. Dans un monde saturé de messages digitaux, les activations terrain, les expériences immersives et les interactions humaines vont redevenir des leviers puissants de différenciation. Le retour du "toucher" dans un monde devenu trop "scroll".
Un autre point clé, c’est l’intégration de la data dans la stratégie créative. De plus en plus de décisions vont se baser sur l’analyse comportementale, la mesure de la performance en temps réel et l’optimisation en continu. Ça oblige les agences à monter en compétence sur des sujets techniques, mais c’est aussi ce qui rend la créativité plus pertinente.
Je pense qu’on va voir émerger une nouvelle génération d’agences et de talents, plus agiles, plus hybrides, plus connectés au terrain comme à la culture. Le défi, ce sera de garder notre singularité marocaine, tout en parlant un langage universel. Et ça, je trouve que c’est une belle opportunité.
Quels conseils donneriez-vous aux jeunes professionnels qui souhaitent se lancer dans une carrière en marketing et communication au Maroc ?Je dirais d’abord : soyez curieux. Le marketing et la communication sont des métiers qui bougent vite, très vite. Ce que vous apprenez aujourd’hui peut être obsolète dans six mois. Il faut donc rester en veille permanente, s’ouvrir à ce qui se passe ailleurs, observer les marques, les tendances, les comportements. Lire, tester, se tromper, recommencer. C’est ça qui forge une vision.
Ensuite, je crois beaucoup à l’idée de se construire une culture du terrain. On ne devient pas un bon stratège en restant derrière un écran. Il faut aller voir ce que les consommateurs vivent, comprendre les réalités du marché marocain, parler avec les vendeurs, observer les points de vente, sentir ce qui se passe "en vrai". C’est là que les vraies idées naissent.
Je conseillerais aussi de ne pas avoir peur de commencer petit. L’important, c’est d’apprendre. Une petite mission bien faite, avec sérieux et implication, ouvre souvent des portes plus grandes qu’un grand titre mal assumé. Osez proposer, même quand vous pensez ne pas être légitime. Le marketing a besoin de regards frais, de gens qui remettent les choses en question, qui posent les bonnes questions. Ne vous censurez pas trop vite.
J’ai la chance de contribuer, à mon échelle, à la formation de cette nouvelle génération de marketers qui arrive sur le marché, à travers les cours que j’enseigne à l’ISCAE. Et souvent, je les vois hésitants, parfois un peu perdus face à la pression de « bien faire » ou de « faire vite ». Alors je prends le temps de leur dire une chose simple : trouvez ce qui vous fait briller. Ce qui vous rend différent. Et creusez. Le reste viendra.
Enfin, quelle est votre plus grande ambition pour Marcom Edge ?Notre ambition pour Marcom Edge n’a jamais été de faire « plus », mais de faire mieux. Mieux créer, mieux impacter, mieux inspirer. On a déjà franchi de belles étapes, être nommés Agence de l’Année au Maroc, être l’agence la plus primée en Afrique à l’African Digital Summit,… Mais ce que nous souhaitons maintenant, c’est continuer à repousser nos propres limites.
Nous aimerions que Marcom Edge reste cette agence agile, passionnée, qui ose des idées différentes, qui fait du bruit quand il faut, mais toujours avec du sens. Et au-delà de la création et de l’exécution, je pense que l’un des chantiers qui nous tient le plus à cœur, c’est d’intellectualiser davantage notre métier. Mon associé Hamza Attaourti et moi avons tous les deux une casquette de PhD, et cette double culture agence / recherche nous pousse à adopter une rigueur constante dans notre manière d’aborder le marketing et la communication. Nous voulons que cette rigueur devienne une vraie valeur ajoutée pour les marques, en leur apportant un conseil stratégique structuré, des analyses plus fines, et une vision long terme qui dépasse la simple traduction créative. Bien penser, c’est déjà bien exécuter.
Mais notre ambition dépasse l’agence. Nous voulons aussi contribuer à structurer un véritable écosystème de communication au Maroc, où les talents, les idées et les expertises circulent librement et s’élèvent mutuellement. Et si, à travers ce que nous construisons, nous pouvons aussi faire rayonner notre pays à l’international, montrer que le Maroc peut produire des campagnes puissantes, stratégiques, culturellement justes et mondialement pertinentes, alors ce sera, pour nous, une immense fierté.