À trois mois des élections présidentielles américaines, Meta a mis fin à CrowdTangle, un outil de suivi des données utilisé par des milliers de chercheurs, universitaires et journalistes pour surveiller les théories du complot et la désinformation sur Facebook et Instagram. Ce service est remplacé par une gamme d'outils plus restreinte, accessible uniquement aux chercheurs agréés.
Depuis l'annonce de la fermeture de CrowdTangle en mars, la décision de Meta a été largement critiquée par des chercheurs, des politiques et des régulateurs. Plus de 50 000 personnes ont signé des pétitions demandant à Meta de suspendre cette mesure jusqu'après les élections, selon la Mozilla Foundation.
Une lettre adressée au PDG de Meta, Mark Zuckerberg, par un groupe de sénateurs et de membres du Congrès souligne que les données de CrowdTangle ont été essentielles pour comprendre et exposer les opérations d'influence liées à la Russie, rapporter sur les effets des confinements liés à COVID-19, identifier les menaces pour les candidats politiques, documenter la propagande liée à l'État islamique et aux crimes de guerre russes, et tester des technologies éducatives.
Meta a justifié la fermeture en mars en expliquant que ses produits de partage de données évoluaient avec les changements technologiques et réglementaires, et que la fermeture de CrowdTangle permettrait d'investir dans de nouveaux outils de recherche, notamment la Meta Content Library.
Cependant, la Meta Content Library est beaucoup plus limitée que CrowdTangle. L'accès est restreint aux chercheurs d'institutions académiques ou à but non lucratif poursuivant des recherches scientifiques ou d'intérêt public. Jusqu'à présent, seuls quelques centaines de chercheurs auraient accès à la Meta Content Library, tandis que les journalistes ne peuvent y postuler, sauf s'ils sont affiliés à une salle de presse à but non lucratif ou partenaires d'une institution de recherche.
Meta affirme que la Meta Content Library répond aux nouvelles exigences réglementaires en matière de partage de données et de transparence imposées par la loi sur les marchés numériques de l'Union européenne.
Brandon Silverman, ancien PDG de CrowdTangle et cofondateur de l'outil en 2011, a critiqué la décision de Meta en mars, la qualifiant d’"incroyablement irresponsable" en raison de la proximité des élections. Il espère que l'héritage de l'outil inspirera des régulations permanentes garantissant un accès en temps réel aux données publiques.
La Coalition for Independent Technology Research a qualifié la décision de Meta de "nouveau coup porté à la transparence sur ses plateformes". Le Real Facebook Oversight Board, un groupe d'universitaires et de défenseurs des droits civiques, a décrit la fermeture de CrowdTangle comme "un autre coup dur pour la transparence", concluant avec "RIP CrowdTangle".